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The Truffe Diaries
10 février 2008

L’agence (tous risques) d’immobilier

 

(c’est vraiment la dernière chance)

 

Bon ami lecteur,

 

Je te souhaiterais bien la bonne année, mais vu qu’on est déjà en Juillet que ça fait un peu trois ans que je t’ai plus donné de nouvelles, tu vas me dire de me carrer mes voeux là ou, comme disent les astrophysiciens, les règles du temps n’ont plus cours et la matière elle-même cesse d’exister. Oui Charlotte, un trou noir, c’est bien, on voit que t’as fait ingénieur fleuriste. (Et que question trou noir, tu sais de quoi tu causes).

Donc ami lecteur, j’aimerais bien te souhaiter la bonne année, mais j’ai un peu peur de ta réaction à tous, donc je le fais pas. Tu observeras cette fois-ci que j’évite de te resservir le reste des crêpes de sarrasin roulées-fourrées au saumon-crème fraîche/fines herbes que maman n’as pas réussi a écouler a Noël malgré une campagne de promotion très très active, ça fait donc deux mois de ça, tu vois que quand même j’ai pris des bonnes résolutions cette année.

 

Alors je te la fais courte parce que j’ai bien compris que tu as trouvé à polissonner ailleurs et que maintenant quand tu veux des histoires cochonnes avec une photocopieuse, tu t’emmerdes plus à venir ici, tu vas directement sur la page d’accueil d’Epson.

Vite fait, je vais quand même te raconter que pour les vacances je suis rentrée dans ma Bretagne profonde, et que j’ai ramené Yumika et Saiko avec moi.

Je passerai sur les petits-déjeûners-qui soulèvent-le-coeur baguette/foie gras de Yumika et ce moment déchirant lors du départ quand elle a essayé de toutes la force des ses petits poings de faire rentrer dans sa valise déjà trop remplie une boite de chocapics format colonie de vacances parce que des chocapics forts en chocolat comme ça, on n’en fait pas au Japon. Je passerai aussi rapidement sur Saiko quand elle a baladé son bronzage tout frais de retour d’Argentine dans ses mini shorts en plein Décembre et qu’elle avait même pas froid, j’ai bien remarqué que mon petit frère a bien remarqué qu’on lui voit les tatouages qui dépassent. J’ai d’ailleurs trouvé que c’était pas de son âge et j’y ai mis drôlement le holà en filant à Saiko un gros jupon en laine hérité de feue ma grand-mère, la catho. A 22 ans, mon petit frère est trop jeune pour ces choses-là.

 

Le passage chez la Sushi Pop a Genève, je te la fais short aussi parce que je sais que t’es un tas de sans-cœur et que si ça se trouve t’as même oublié qui c’est, mais si tu veux savoir maintenant elle est technico-commerciale dans une boite qui vend des joints, oui parfaitement, faut bien bouffer comme elle dit, alors que les jeunes se droguent à cause d’elle c’est pas son problème, de toutes façons c’est des Suisses donc si c’est pas le problème de Pop, on se demande bien le problème de qui ça va être. Avec les sous elle est en train de préparer une course de ski de fond en Suède, par ailleurs. La majorité des gens se mettent les sous au chaud sur un compte aux îles caïman afin d’avoir de quoi couler des vieux jours paisibles au cas ou, au hasard, leur banque viendrait a perdre une fortune dont la leur dans les subprimes et les traders ineptes. Mais sushi Pop, qui aime vivre dangereusement, non seulement elle se fait payer en francs suisses, mais en plus elle claque sa thune dans des courses de ski de fond en Suède. Qu’elle vienne pas pleurer quand elle sera SDF et qu’elle se pèlera le cul dans son carton à côté du gros jet d’eau du centre ville.

 

Donc voilà, je t’ai raconté mes vacances, rapide. Mais en fait au départ j’avais deux sujets de fond de slip dont j’aurais voulu t’entretenir, pour la nouvelle année.

Et attention, les deux c’est du balèze hein. Du vrai sujet d’article de fond pour journal engagé, genre Podium magazine voire même Chasse, Pêche et Tradition.

Je te balance le premier, tu vas voir que je déconne pas :

 

le racimse au japon.

 

(tanlanlan)

 

 Tu vas me dire, ben tiens, parle-moi de la neige en Suède tant que t’y es, ou bien de la liposuccion et Missy Elliot. Oui je sais que c’est pas franchement de la breaking news, mais ça n’empêche pas que pour une fois que je peux la ramener sur un sujet connu en commençant mes phrases par « j’y étais, j’ai tout vu », tu penses si je vais me priver.

Pour la liposuccion et Missy Elliot bizarrement j’avais moins de témoignages a t’offrir, donc on va faire avec ce que j’ai, et ce que j’ai pour le moment c’est le racimse au Japon, donc.

Mise en situation :

Quand par exemple tu vas dans une agence d’immobilier voir ce qu’ils ont comme appart, parce que c’est pas tout ça mais Yumika se barre en Avril pour habiter au fin fond du trou noir de la banlieue d’Alpha du Centaure, et que tu penses que t’es encore un peu jeune pour aller t’enterrer a 1 heure en RER de toute civilisation, donc tu t’actives pour trouver un appart dans un quartier encore a peu près branchouille, en te disant qu’il faudra supporter les cons de yuppies comme voisins si tu veux avoir un PMU où aller boire ton ballon de rouge le dimanche soir. Bon donc moi et ma bonne copine Kim-san, Coréenne de son état, nous rendons dans une agence avec le projet audacieux d’y dégotter le nouvel appart de notre colocation à venir. Ben oui ch’ten fous, à peine avions-nous jeté notre dévolu sur une turne trois pièces à l’aspect prometteur et avions-nous demandé la permission de la visiter, que le loufiat revenait d’une conversation téléphonique avec le propriétaire pour dire, d’un air pas spécialement contrit parce que bon, c’est pas sa faute non plus, hein, il décide pas : “désolé, cet appartement n’est pas accessible aux étrangers.” Evidemment, d’indignation je manque de faire sauter le noeud papillon de mon string et je fais remarquer à voix très haute à Kim-san, qui reste remarquablement calme, qu’en France on pourrait faire un procès pour ce genre de diffamation ouverte. Le visage du loufiat exprime alors d’une manière presque audible la suggestion : “t’as qu’à y retourner, en France.” Kim-san ajoute alors avec flegme qu’encore j’ai de la chance, j’aurais pu être Chinoise ou pire, noire (le fond du fond de la lie de la race humaine étant probablement incarne par les Chinois noirs). Parce que apparemment dans ces cas-là, si tu veux te trouver un logement un peu plus élaboré que quatre pièces de carton devant l’entrée de la gare d’Ikebukuro, il faut salement banquer. Bien décidées à ne pas lâcher un seul de nos picaillons durement gagnés à des goujats racimstes, nous résolûmes[1] de rester dans l’appartement qu’elle occupe, pour nous entendre dire par le propriétaire qu’il allait falloir compter dessus et boire de l’eau claire ma grosse, eut état à que je suis Française et que Kim est Coréenne.

Y a eu aussi la collègue de travail l’autre jour qui m’a aimablement enjointe à “rentrer dans mon pays”, mais là c’était sûrement affectueux. Y a aussi tous les Japonais d’un certain âge qui, quand ils rentrent dans le rade où j’ai mes habitudes, commencent par tomber en arrêt en s’écriant “ah! Une étrangère!” et par ensuite tenter de me parler en anglais. Si je suis de disposition urbaine et que je réponds en japonais, ils tombent à nouveau en arrêt devant ce prodige de la nature : une étrangère qui parle japonais dis-donc, avec nos neurones différemment connectes et notre matière grise foncièrement inférieure en qualité, il aurait pas cru qu’on puisse. En général le même genre de personnage passé trois verres commence à vouloir essayer de me palper les seins, affectueusement bien sûr, faut pas y voir malice.

Tu le vois, ami lecteur, contrairement à ce qu’Amélie Nothomb a bien pu raconter, le people japonais est dans son ensemble accueillant, ouvert d’esprit, et attentif à ne pas heurter les sensibilités étrangères. Qu’on vienne pas me dire que les étrangers n’y sont pas bien accueillis surtout. Surtout les Chinois, les noirs et les filles avec des gros seins.

 

Bon là ça commence à sentir la conclusion, là tu attends la vanne de fin ou peut-être un jeu de mots pourri pour pouvoir aller pisser…

 

SAUF QUE.

 

Tout ça nous amène au DEUXIEME sujet (tu auras tous remarqué que je reprends mes bonnes habitudes de la note à tiroir).

Mon deuxième sujet chaud chaud bouillant c’est : l’immobilimse l’immobilier à Tokyo. Si tu as un sens de l’humour qui ne sort pas souvent du caniveau, voire du ruisseau tout au fond d’ycelui, et si comme moi tu as eu l’occasion de regarder Groland, tu sais que la crise de l’immobilier, ça consiste principalement à se faire enculer (plus ou moins littéralement) par des agents immobiliers qui te feront payer la peau des couilles plus celle des implants de ta femme pour un taudis. Bon, certes y a pas de crise d’immobilier à Tokyo, et les loyers sont à peu près équivalents à Paris ce qui est indigne mais encore supportable, cependant sois rassuré ami lecteur, les agents immobiliers arrivent quand même bien à t’enculer malgré tout. Dans le paragraphe précédent nous avons observé que la coloc avec une autre étrangère, c’est pas kosher. Je tente donc un nouveau subterfuge : la coloc avec Saiko. Là aussi, moyen glop. L’idée que deux personnes non enchaînées par les liens sacrés du mariage veuillent emménager ensemble, et dans DEUX chambres séparées en plus, ça défrise beaucoup d’agents immobiliers. Saiko, impatientée, finit par leur promettre d’hypothéquer sa mère en guise de garantie. Les agents immobiliers, qui ne prennent ni les collocations ni les PACS, mais qui prennent les hypothèques sur les membres de la famille proche, acceptèrent son offre avec soulagement. Nous allâmes donc d’un pas alerte visiter ce qu’il nous recommandait comme l’affaire du siècle. Je fus un peu surprise de voir que l’agent ne nous accompagnait pas et me demandai comment on allait faire pour ouvrir

la porte

. C’était compter sans l’astuce sans limite de ce jeune homme. Si tu as déjà vu un épisode de Fort Boyard, ami lecteur, tu as une idée assez fidèle de la façon dont se passe une visite d’appartement a Tokyo. Tu commences par déchiffrer un parchemin qui, à l’aide de kanjis mystérieux et d’abréviations codées, te révèle la vétusté du bâtiment, la surface habitable, le nombre de mois de loyer à payer en cadeau au propriétaire[2] et en frais d’agence, le rapport au carré de l’hypoténuse et la proximité de la station de métro (en général cette dernière indication est toujours un gros mensonge). Une fois que t’as décodé les trucs et décidé que c’est correct, il y a une carte alambiquée. Avec du bol, de la patience et un recours extensif aux petites vieilles qui jalonnent ton parcours, tu finis par trouver le bâtiment. Là comme des cons tu crois que t’es sortis d’affaire, tu te détends. Ah! Naïf que tu êtes! C’est pas fini : il faut appeler le vendeur, et te faire indiquer LA LOCALISATION DE LA CLEF. La seule différence avec le père Fourasse c’est qu’il te le fait pas en vers, mais autrement c’est la même idée générale, et j’ai pu observer avec intérêt Saiko tenir son téléphone portable d’une main avec au bout du fil le vendeur qui l’exhortait a “chercher la boîte au fond à gauche”, et plonger son bras avec une mine dégoûtée derrière des tuyaux de chauffage ou se tapissaient probablement toutes sortes d’araignées, afin d’en extraire La Clef. Inutile de te dire que je trépignais d’excitation à côte et que je devais me retenir très fort pour ne pas crier “prends la clef, la clef, FAIS GAFFE A LA TARENTULE, va-y sors, sors on a plus le temps”  

Une fois La Clef arrachée de haute lutte au chauffage central et ses mygales gardiennes, donc, nous pûmes ouvrir la porte, et entrer dans l’appartement sans que qui que ce soit ne nous défie en combat singulier pour avoir le droit de franchir le seuil, ce qui me déçut un peu. Nous vîmes enfin cette fameuse affaire. C’en était effectivement une, si ce n’est que l’appart était un peu cher, un peu petit, un peu sombre et, au final, un peu loin de tout. A part ces menus détails une affaire il te dit le monsieur.

Inutile de te dire qu’arrivé à ce point, tu es désespéré, très en colère contre le monde entier, que tu es bien conscient que le monsieur de l’agence est en train d’essayer de t’enculer à sec, et que la seule agence à laquelle tu veux avoir affaire c’est celle-là :

agence_tous_risques

Comme apparemment ces cons-là veulent bien sauver les jeunes filles en détresse des guerilleros et des maffieux, mais que le monde cruel de l’immobilier tokyoïte fait reculer même Barracuda, on a dû se démerder comme on a pu, c'est-à-dire sans eux mais avec une autre agence, dont la petite nénette ne payait pas de mine, mais elle a fait rendre gorge au téléphone à plus d’un propriétaire qui refusait les étrangers. C’était un peu notre pit-bull à nous, on a remercié sainte Moustache de l’avoir mise sur notre chemin.

Comme en cours de conception du projet Jasmine, une Australienne, vint se greffer chaotiquement dans le rôle de colocataire supplémentaire, il fallait revoir nos ambitions spatiales à la hausse. Pour la suite on tapa donc carrément dans les maisons.

Nous en vîmes une de bien, avec la clef planquée derrière le compteur électrique, des tatamis, trois chambres et un jardin, dans un bled qui commençait à se rapprocher du trou du cul du monde, mais a une distance raisonnable. Les 20 minutes de marche entre la station de métro et la maison dans le froid furent déchirantes, plus d’une fois Saiko dût m’empoigner pour m’empêcher de fuir en pleurnichant pour me réfugier dans les couloirs malodorants mais bien chauffes du métro de Tokyo. Arrivées à la maison, il faisait bien entendu nuit. Armées de nos téléphones portables et de nos fidèles briquets, nous visitâmes donc la maison plongée dans l’obscurité. A part le fait que les tatamis ne puaient pas le moisi, ce qui est toujours bon signe, nos observations furent relativement pauvres. Ah si : je remarquai qu’il s’agissait de la station de métro de mon sensei d’aikido, le pas gentil de la paire, pas le gros nounours, l’autre, celui qui, lorsqu’il te jette sur les tatamis, en tire des bruits de qui ne sont pas sans rappeler le claquement de la pâte à pizza en train de se faire violemment aplatir par un pizzaiolo sous stéroides. Je sais pas pourquoi mais je flippe un peu à l’idée de tomber sur lui au supermarché un dimanche matin quand j’aurai la gueule de bois et mes pantalons de pyjama qui baillent sur le cul.

 

Putain s’il faut que je mette un smoking pour aller m’acheter trois asperges et deux yaourts bio le dimanche matin, je sens que ma vie va prendre un tour stressant.



[1] Si je te jure, j’ai vérifié. Le passé simple de résoudre c’est résolûmes. Comme moudre c’est moulûmes, et découdre decoulûmes. Ah heureusement que je suis là pour t’aider à gagner au scrabble hein.

[2] La vie du chat qu’il me reste, ce truc existe. “l’argent de la clef”, que ça s’appelle. Un paiement qui n’est justifié par aucun frais pour le propriétaire, puisque la clef est la même que pour le locataire précédent. Mais ça lui fait deux mois de loyer en cadeau, comme ça, bonus, parce qu’on est copains.

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Commentaires
G
Vous étiez au Japon? J'aime bien ce pays. C'est le plus pacifique au monde et le plus débrouillard aussi, avec la Chine. Mais je dois reconnaître que la vie y est cher, et donc, je ne parle plus de l'immobilier.
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I
Bien résumé : "l'agence tous risques" : y a rien à dire
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A
Bon alors fais gaffe lors du test final de pas hurler quand on va te mordiller le clito. Faut prouver que tu dérangeras pas les voisins. Bisous ma belle.
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M
Tout ça ne dit pas si tu as trouvé la maison de tes rêves (ou celle la moins proche possible de tes cauchemars...). Plaisir de te relire maintenant que tu es allée acheter tes clopes en Sibérie. T'as l'air en forme.
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